Tandis que grisaille et froid de canard pointent le bout de leur nez mouillé, Mahaut Drama, queen du stand-up queer et féministe, brandit fièrement la bannière du rire militant. Après avoir embrasé la cérémonie de remise des prix Fooding 2025, elle nous confie ses plans pour se réchauffer loin des cheminées.
La dernière claque culinaire ?
La calzone de Pizza Julia, dans le 12e à Paris. Rien que d’y penser, ça me rend heureuse. C’est un plat réconfortant, riche et chaud. Comme le fait de serrer un plaid contre soi en mangeant de la glace dans un bol, et en regardant La Boum. De l’amour dans un monde de brutes.
La recette anti-blues du dimanche soir ?
De l’aligot. Ça ne peut jamais rater, comme un plan à trois. Erratum : ça rate à chaque fois qu’un DJ fait partie du plan à trois.
Le spot ou rire et grailler à la fois ?
La péniche de La Nouvelle Seine, où j’ai joué mon spectacle l’année dernière. C’est un joli bateau près de Notre-Dame, avec des résidences de cuistots qui régalent à chaque fois. Et puis, dans la cave, il est possible d’aller voir le spectacle de son choix. C’est aussi un lieu chargé d’histoire pour le rire militant. Sa directrice artistique, Jessie Varin, a toujours été à l’avant-garde, de Blanche Gardin à toute la bande du Comédie Love, un collectif de stand-up queer et féministe qu’on a créé en 2018 avec l’humoriste Tahnee.
Le petit déj’ qui donne envie de se lever tôt ?
Alors déjà, je ne me lève tôt sous aucun prétexte – ce qui pose des problèmes, il est vrai. C’est toujours surprenant quand je dis à un employeur que je ne suis pas debout avant midi, on dirait que je me prends pour Mariah Carey. Mais la vérité c’est que je fais du stand-up depuis mes 22 ans, et que je dois être en forme pour jouer tous les soirs jusqu’à minuit. Alors forcément, ça décale. Pour le brunch donc, je vais immanquablement à La Marine. Le resto sert en continu. Le bar en zinc, les grands miroirs, les colonnes au mur… C’est moderne et suranné à la fois. Quand j’arrive et que je demande des escargots et des œufs à la crème de truffe, j’ai l’impression d’être une enfant du siècle.
Sur le feu en ce moment ?
Je joue mon spectacle Drama Queen à Paris, au Théâtre de l’Européen jusqu’en décembre, avant de reprendre en avril. Je suis aussi en tournée dans toute la France et en continu depuis plus d’un an, et pour encore deux ans. Sinon, j’écris un livre qui sortira en avril sur la façon dont la fête queer m’a sauvée. Et bien sûr, je fais de mon mieux pour faire rire Yann Barthès tous les mardis dans « Quotidien ». Il a un sourire qui éclaire une salle et l’actu de merde, ça vaut dix Xanax.
Ton resto préféré ?
La table de ma grand-mère et celle de mon père. La cuisine, c’est sacré dans ma famille périgourdine et italienne. Le gluten coule dans nos veines. Pour mes anniversaires, mon père cuisine des pâtes et c’est très sérieux comme affaire. Il m’a toujours dit de le regarder faire les sauces pour apprendre. C’est de l’instinct pour lui, et non des proportions. On est des « bons vivants ». Ma grand-mère aime notamment me dire : « Mahaut, tu sais bien que je ne bois pas d’eau, ressers-moi du rouge. » Elle a 94 ans et toute sa tête. Elle est l’exception qui confirme la règle : soyez heureux avant de rentrer dans une dictature du bien-être, le rire conserve mieux que le running. Sinon, honnêtement, je vais peu au restaurant, mis à part les bistrots de quartier. Je suis intermittente depuis deux ans, et financièrement, ça n’a pas vraiment été ma priorité d’être une foodie. Mais je dirais que j’aime tout ce qui est bon, et que j’exècre les ambiances feutrées et polies qui cachent un mépris de classe.
